Transcription de LRT_02_01_00490 Jean-Philippe Toussaint Gestionnaire brigittefc

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Laboratoire Litt&Arts Brouillons de La Réticence Jean-Philippe Toussaint
II, 490

qui s'étendaient dans l'obscurité, et le phare de l'île de Sasuelo, auloin, continuait d'apparaître par intermittence dans la nuit, qui balayaitun instant la surface de la mer avant de disparaître de l'autre côté del'île. Je marchai une dizaine de minutes ainsi avant d'apercevoir devantmoi la maison des Biaggi dont le mur d'enceinte se dressait dans la nuit

Je m'étais arrêté devant l'entrée de la propriété, et je regardais lavilla dans l'obscurité à travers les barreaux très noirs de la grille. Levent faisait bruisser légèrement le feuillage des arbres, et la terrasseétait déserte, dans l'ombre de laquelle un parasol renversé gisait sur lesol, tandis que la silhouette de deux jarres de terre cuite qui contenaientdes vestiges bleuâtres et désséchés de corymbes d'hortensias s'élevaientde chaque côté de la grande porte-fenêtre. Sur le petit chemin de graviersqui conduisait au garage, j'avais aperçu tout de suite la vieille Mercedesgrise, et je ne doutai plus alors que Biaggi se trouvait dans le village,car, si la voiture était déjà garée là la première fois que j'étais venu,je l'avais également aperçue sur la place du village le matin où j'avaisdécouvert le chat mort dans le port. Or, elle se trouvait de nouveau làmaintenant, garée contre un arbre dans la pénombre de l'allée, et Biaggise cachait selon toute vraisemblance, car comment expliquer sinon que jene l'eusse pas encore croisé dans le village depuis mon arrivée ? Comment expliquer qu'il ne vint même pas prendre son courrier ? Comment expliquer que même son courrier, il ne vint pas le prendre ?

Avant de repartir, Jje glissai machinalement ma main dans la boîte auxlettres , et je sentis sous mes doigts le contact ( d'une fine feuille de papier pliée en deux, que je saisis aussitôt entre deux doigts pourdécouvrir qu'il s'agissait ) d'un télégramme. Et [ jJe venais à peine de sortirle télégramme de la boîte aux lettres que j'aperçus les phares d'unevoiture au loin qui descendait dans la nuit vers la maison des Biaggi.Je cherchai un endroit où me mettre à l'abri et, exerçant une poussée   poussant  dela main sur la grille d'entrée de la propriété, je me rendis compte quela chaîne qui la maintenait fermée était simplement enroulée autour desbarreaux et que ma légère poussée avait suffi à l'entrouvrir. Je finis de