Transcription de 31AF19_001_03_015 Gestionnaire Camille_D

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Laboratoire Litt&Arts

Texte transcrit

8ENFIN FEMINISTE

et je me disais : s'il faut conquérir un poste de responsabi-lité, je vais le conquérir. Ce n'est pas parce que je suis une femme que je vais y renoncer. J'ai franchi quelques bar-rières, et maintenant, à l'endroit où je suis, j'ai l'impres-sion d'être dans une phase de régression. J'ai le sentimentd'être sommée soit de me conformer aux attitudes deshommes qui sont autour de moi, soit de me taire, soit de renoncer. J'ai lu récemment, dans le revue l'Infinie, unentretien entre Julia Kristeva et Danièle Sallenave. Lesujet était au départ littéraire, mais la conversation adérivé sur la question des femmes. Kristeva a dit quelquechose qui m'a beaucoup frappée, parce que cela corres-pond à ce que je ressens dans mon milieu de travail : "Aujourd'hui, il est plus facile d'être une femme en n'étantpas une femme, mais en se confondant avec l'ordre nor-malisateur qui ne manque pas de récompenser celles quis'y plient." D'où, probablement, l'attitude ambigüe deMartine Aubry que vous évoquiez.

Benoîte: C'est désolant d'être obligée de se démarquer desa féminité pour entrer dansle monde du travail- C'est pour cela que la parité est vitale pour nous, à tous les niveaux. Selon des études menées aux Etats-Unis, c'est à partir de trente pour cent que les femmespeuvent exercer une influence, avoir une action appré-ciable dans un groupe. C'est un seuil fatidique. En des-sous, elles ne servent à rien, sinon à fournir desmodèles d'identification à d'autres femmes, ce qui n'estpas rien d'ailleurs. Mais elles sont des alibis, des otages, qui ne pourront modifier en aucune façon l'ordre nor-malisateur.

Josyane - J'ai interrogé Françoise Giroud quand elle était Secrétaire d'Etat sur la parité, àpropose des déclarations des dix femmes ministres. Elledisait, assez justement me semble-t-il, que l'obligation deparité ne pouvait pas être une "revendication intellec-tuellement satisfaisante",mais devait être "un choix tristement raisonnable et indispensable1". "Alors les quotastactiquement , il faut s'y résigner, sinon les femmesn'y arrivent pas."

1. "Françoise Giroud, insatiable et insaisissable", in le Mondedu 7 octobre 1996.

Benoîte - Il faut savoir ce que l'on privilégie : soit les Grandsprincipes, tels que l'indivisibilité de la République, soit l'accessoiondes f aux responsabilités et à la gestion de leur pays. Autant onpeut rester à l'aise sur les Grands principes, autant il est délicatde proposer des compromis, même momentanés. Cela dit, croyez bienque ce n'est pas l'universalisme qui guident nos députés quandils refusent d'appliquer la parité ou la déclarent inconstitutionnelle. C'est le souci de conserver leur siège ! Ce qui n'est pas repréhensibled'ailleurs mais parfaitement hypocrite.

Josyane - Elisabeth Badinter dans un article du Mondes'est dite "profondément humiliée par l'idée des quotas"