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On me dit parfois: "Mais alors, vous n'aviez donc pas lu "Le sexe"?"


On oublie que Simone de Beauvoir n'a écrit ce livre fondateur qu'en 1949...J'avais déjà 29 ans, 2 enfants et bientôt 3...un peu tard pour choisir la liberté! En plus, cette Bible du Féminisme qu'est devenu le livre de Beauvoir aux Etats-Unis a été très mal reçu en France: il a été mis à l'index à la demande du Vatican et Beauvoir a été traînée dans la boue par toute la critique française (même par un homme comme Albert Camus !). Je ne vous citerai que François Mauriac pour vous donner une idée du ton général de la critique, qui déclarait : "Cet ouvrage a atteint les limites de l'abject."


Alors pourquoi ce mot insolite d'abject pour un ouvrage philosophique? Eh bien parce que Beauvoir la première osait s'attaquer à un sujet tabou: la sexualité féminine et en parler en utilisant un vocabulaire qui a paru obscène, d'une vulgarité intolérable parce qu'elle utilisait les vrais termes pour parler de la physiologie féminine; les mots pour le dire, comme écrira, plus de vingt ans après, Marie Cardinal, dans un récit qui a fait scandale chez son éditeur qui est aussi le mien (Grasset) quand elle l'a soumis au Comité de lecture. Je m'en souviens, j'étais présente...et voilà qu'elle osait parler de son sang menstruel, un scandale! Le sang des champs de bataille, le sang des règlements de comptes entre truands, le sang des violences conjugales même, à la bonne heure. Le public aimait. Mais le sang des femmes, celui des règles, était un sujet "abject" ! Je rappelle que Linné, un grand naturaliste suédois du 18è, a commencé la préface de son "Histoire naturelle" par ces lignes: "Je ne décrirai pas les organes féminins parce qu'ils sont abominables." 4

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JulieA