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Chap. VIII
ENFIN FEMINISTE

reste un acte d’insubordination au XXIe siècle encore. Mais alors il faudrait que ces femmes aillent jusqu’au bout et se fassent appeler Monsieur !


Josyane - Vous interprétez ça en fait comme un réflexe de peur ?


Benoîte - De timidité manque d’assurance chez les femmes mais d’une vraie peur chez les hommes, me semble-t-il, face à ces rivales qui parviennent dans les bastions qu’ils s’étaient réservés. L’anomalie dans le langage souligne l’anomalie dans la société. Le langage forge l’identité de ceux ou celles qui le parlent, que cette identité soit nationale, culturelle ou sexuelle.


Josyane - Pourtant si les femmes n’imposent rien, elle disparaissent. Et derrière les mots, on tente de les faire disparaître. Il m’est arrivé un jour un incident de ce genre. Un homme m’a injuriée, en mon absence sur un plateau de télévision. Et le présentateur a laissé faire. Mon journal a protesté contre ce comportement et le présentateur m’a faxé la phrase d’excuses qu’il comptait prononcer à l’émission suivante. Elle disait : « Nous présentons à notre confrère Josyane Savigeau nos excuses pour... » Je l’ai immédiatement appelé pour lui signaler que le féminin de confrère était consœur. Il n’a pas semblé comprendre de quoi je parlais. Pire, c’est tout juste s’il n’avait pas le sentiment que je cherchais à être désagréable en faisant cette remarque !


Benoîte - Il aurait pu vous rétorquer que le mot « consœur » n’est dans aucun dictionnaire. Il n’y est apparu que très récemment. Et le mot « sororité », lui, n’a fait son entrée que l’an dernier. Pourtant, c’est le pendant de fraternité, dont le dictionnaire nous dit que c’est « un sentiment qui renforce l’identité masculine ». Mais il semble que personne ne se soucie de l’identité féminine. Au contraire, tout se qui sabote l’assurance des femmes et bon à prendre. Ce n’est pas raisonné, c’est une sorte d’instinct de conservation des hommes, d’occupation de tout le terrain. Et le pire, c’est que la manœuvre a réussi : moins les femmes s’imposent et plus le féminin se déprécie. Et plus il se déprécie, moins on a envie de l’employer. Et pourtant, vouloir se mettre à l’aise dans le langage, ce n’est pas un caprice un besoin<> vital, un moyen d’intégration sociale. Mais les femmes redoutent le discrédit souvent destructeur qu’elles encourraient à passer pour féministes en se faisant appeler « conservatrice de Musée » ou « Directrice ». C’est un amalgame ridicule mais ça marche !


- Josyane Donc votre loi n’aura servi à rien ?

Contributeurs (1)
Cécile Libellune