Vous visualisez actuellement un média autre que celui transcrit/à transcrire.
belle fille Aurore Dupin, la future George Sand.

« Je n’accepterai pas que ma fille devienne un bas-bleu », déclare la mère
d'une de ces Dames aux chapeaux verts.

« Pas de jupons chez nous », renchériront les Goncourt, refusant de
couronner Marie-Claire, le très beau roman de Marguerite Audoux, en 1906,
pour cause de... jupon !

Comme « femme savante », le terme de « bas-bleu » allait faire fureur et
mettre à mal la réputation des « déserteuses » qui abandonnent leur foyer
pour faire carrière. Les mots paris peuvent tuer et font plus de mal qu'une
longue diatribe. Barbey d'Aurevilly, auteur que mon père portait aux nues
avec J.K.Huysmans, autre antiféministe notoire, intitulait un de fes romans
les plus venimeux les Bas-Bleus, et Albert Cim allait en faire autant dix ans
plus tard. Curieusement, cette expression ne s'applique jamais aux hommes,
si pompeux qu'ils soient parfois !

Non qu'il se soit jamais trouvé de philosophes, de scientifiques, de poètes
ou d'hommes politiques (1) pour affirmer l'égale dignité des deux sexes. Mais
ils restèrent isolés (Condorcet fut pratiquement le seul défenseur des femmes
avec Guyomar sous la Révolution), passèrent pour de doux huluberlus ou de
dangereux utopistes (le génial Fourier resta dans la misère toute sa vie). Îls
ne furent jamais cités dans nos manuels pour leur défense des droits des
femmes. Le féminisme, c'était une lubie, un détail sans importance, une non-
pensée.

Comme toutes mes contemporaines, je suis donc restée privée de toute
référence, de toute analyse de ma situation, donc, de toute porte de sortie du

(1) cf le féminisme au masculin 1977; Ed Denoël
Contributeurs (1)
bob.e