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Rosie GROULT

bottier, tricotaient à 5 aiguilles les chaussettes de leur nombreuse progéniture et venaient ? chercher leurs filles en classe, vêtues de tailleurs sombres ou de manteaux d'astrakhan l'hiver. Maman détestait l'astrakhan. Elle porta longtemps - beaucoup trop longtemps à mon goût- un ahurissan ahurissant manteau de singe avec de longs poils noirs en bataille. L'idée qu'elle pourrait apparaître à la porte de l'Institut Ste Clotilde, rue de Villers exel, Paris 7e, avec ses escarpins à talons qui claquaient sur le trottoir d'une manière indécente, ses "bibis" extravagants et son allure de reine, s'apparentait à un cauchemar.

Elle ne vint jamais par bonheur et l'Ecole put rester pour moi un refuge contre ses excentricités et l'occasion de cultiver un réel goût de l'étude, encouragé par un tempérament moutonnier et besogneux. A la Sorbonne, plus tard, je multiplierais les certificats, grec, philologie, études pratiques d'anglais, biologie... tout pour rester étudiante et retarder l'entrée dans l'arène, où il faudrait "tenir la dragée haute" aux garçons (encore une expression de ma mère) aux garçons qui constituaient à mes yeux une tribu redoutable, aux moeurs mystérieuses, mais globalement hostile aux filles. Et il faudrait pourtant que je "décroche" parmi eux un mari (toujours le vocabulaire de la performance), ce qui me paraissait, vu l'état de mes munitions, un exploit hors de portée. Tout à fait à côté de la plaque, mon père, citant Barrès, me répétait "J'aime les jeunes gens qui entrent dans la vie l'injure à la bouche". A moi qui n'avais jamais su dire ZUT !

Avec mes complexes, j'étais faite sur mesure pour intégrer le troupeau des agnelles de Dieu. Ne serait-il pas plus simple en effet d'entrer au couvent où m'attendait un divin époux ? Finie l'obligation de faire la belle, de séduire les bonhommes. Finis les talons haut, le rouge Guitare, les indéfrisables ratées, les bigoudis tous les soirs ! J'ai caressé ce projet religieux sans véritable sincérité et sans doute par défi à mes parents, pendant près d'une année.

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Aviana