poète, du navigateur du bout du monde au cuisiner inventif, de l'éditeur à l'édité, de mon amant à celui que j'ai toujours suspecté d'autres liaisons, de l'écrivain qui n'écrivait jamais une lettre, par prudence disait-il.

J'ai toujours fait bonne figure ayant su d'avance que sce serait acrobatique de vivre avec tant de personnages qui prétendraient tous s'appeler Paul Guimard ! Mais il a été fidèle toute sa vie, sinon à moi, du moins à notre couple. C'était un homme fidèle à sa façon, fidèle aux choses de la vie : au whiskey single malt comme aux bons vins, à la cigarette, à la pipe comme au cigare, à l'océan Antlantique comme au Pacifique, à tous les inconditionnels du grand large, d'Eric Tabarly à Olivier de Kersauson, de Fauconnier à Alain Colas. Fidèle à des hommes très diverses et sachant hélas inspirer de vraies passions, me laissant au coeur une question lancinante : Quand, avec qui a-t-il été vraiment heureux ? Sans doute n'était-il pas un homme heureux mais un homme de plaisirs. Alors que, malgré tel ou tel de mes malheurs, j'ai été, moi, une femme heureuse.

Et puis nous avions la mer que nous avons labourée ensemble en Bretagne, aux Caraïbes, puis en Irlande jusqu'à mes 80ans, bien au-delà du raisonnable. Mais là nous formions une unité de vie, un équipage, qui n'avait pas besoin de mots pour s'entendre. J'ai souvent rêvé d'ailleurs qu'il serait beau de chavirer ensemble sur un écueil celtique et d'être entraînés tous les deux "dans les goëmons verts" par le poids de nos bottes cuissardes. Une belle mort pour deux romanciers.

Mais dans les années 50, je n'en suis qu'à ma renaissance : à un amour heureux, à un nouvel enfant et à l'écriture. Elle apparaissait un peu à la manière d'une rivière souterraine qui trouve enfin une issue au grand jour. Elle avait