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VI (2) 3


Ce matin, il y avait un chat mort dans le port, un chat noir qui
flottait à la surface de l'eau, il était droit et raide, et il dérivait
lentement le long d'une barque. Hors de sa gueule pendait une tête de
poisson décomposée de laquelle dépassait un fil de pêche cassé d'une longueur
de trois ou quatre centimètres. Sur le moment, j'avais simplement imaginé
que cette tête de poisson était ce qui restait d'un appât de ligne morte,
le chat avait dû se pencher dans l'eau pour attraper le poisson et, au
moment de s'en saisir, l'hameçon accroché dans la gueule, il avait perdu
l'équilibre et était tombé. Les eaux du port était très sombres à l'endroit
où je me trouvais mais, de temps en temps, je devinais la présence d'un
cortège de poissons qui passait en silence sous mes yeux, des labres ou
des mulets, tandis que, tout au fond, parmi les algues et les cailloux, des myriades d'alevins s'acharnaient sur le cadavre éventré d'une murène en décomposition. Avant de repartir, je m'attardai encore un instant sur la
jetée à regarder le chat mort, qui continuait de dériver dans le port dans
un très lent mouvement de va-et-vient, tantôt vers la gauche et tantôt vers
la droite, suivant le flux et le reflux imperceptible du courant à la surface
de l'eau.


J'étais arrivé à Sasuelo à la fin du mois d'octobre. C'était déjà l'automne,
et la saison touristique touchait à sa fin. Un taxi m'avait déposé un matin
sur la place du village, avec mes valises et mes sacs. Le chauffeur
m'avait aidé à détacher la poussette de mon fils de la galerie de la voiture, une
vieille cinq-cent-quatre diesel dont il n'avait pas coupé le moteur et qui

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