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Rosie Groult 

butée... Il cherchait des jeunes filles pour le film qu'il
préparait et proposa à maman de me faire faire des
bouts d'essai. Elle se montra enthousiaste. Je me liqué-
fiai.

A la veille du rendez-vous au studio, je lui annonçai
que je me sentais incapable d'affronter une caméra. 
"J'aime encore mieux faire des ménages", lui
dis-je d'un air lugubre. On me considéra comme une
débile. Mon éducation était décidément un échec. 

Après la mort de ma mère, trente ans plus tard, j'ai
recueilli le grand cahier de maroquin rouge où elle
notait ses réflexions, ses poèmes, et recopiait ses plus
belles lettres, à Marie Laurentin, à Jean Cocteau, à
Pierre Benoit, à Paul Poiret, à son frère, à tant d'autres. 
Au détour d'une page, dix lignes pour dire sa déception
devant sa fille aînée, qui n'avait alors que seize ans : 
"Rosie a une nature plus réceptive que créatrice. je

Je sais maintenant qu'elle n'a pas de
sens majeurs. Elle doute d'elle et
croit trop aux livres. Elle se voit éner-
gique, elle n'est que butée. Je commence
à perdre espoir pour son avenir".
             Ma pauvre maman, j'allais te
décevoir longtemps encore et
mettre des années à sortir de ma léthargie.
     C'est beaucoup plus tard que
j'ai compris ce qui m'avait paralysée :
l'impossibilité de ressembler à ma
mère et l'absence de tout autre modèle. 
Nicole Arouet était une des seules femmes
                                                    de ma --->
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