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Rosie Groult

J'avais vraiment une mère magnifique.
Ou bien je n'ai pas su être à mon tour une <m>ère magnifique, ou le moule des
petites filles modèles s'était perdu: je n'ai obtenu 
d'aucune de mes trois filles cette soumission de larbe où n'a couvé, hélas,
aucune révolte avant un âge avancé.

Ma mère, impavide, oeuvrait pour mon bien.Comment refuser le bien?
Elle ne pouvait qu'avoir raison. Elle était belle, avec de
grands yeux, bleus un peu fixes comme les miens. <<Les yeux de vache
des Poiret!>>, disait mon père, qui avait les yeux en
bouton de bottine. Impeccablement, mais trop maquillée, comme souvent
les <<jolies femmes>> de ce temps là, surtout quand
elles travaillaient dans la mode; jamais malade et partant chaque matin à la
conquête du monde, les ongles rouges, de grosses
bagues au doigts, une coiffure courte et cantrée, rectifiée chaque jour au fer
a<à> friser que j'entendais cliqueter dans la salle de bains
quand elle l'enlevait de son support où brûlait une tablette d'alcool Meta.

Elle n'aimait que la ville, à condition qu'elle soit capitale; elle détestait la
Bretagne, les maisons de campagne, les chaussures
de sport; ne nageait pas et ne savait pas conduire; n'était heureuse
qu'en dessinant des modèles pour sa maison de couture, ou
entourée d'artistes et d'écrivains qui venaient à la maison pour déguster
l'insolence de Nicole et les gigôts en croûte d'André. La nuit
je la surprenais souvent à écrire <à>ses nombreux <<amoureux>> , de sa belle

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