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(début de transcription avec tesseract)
Le Non que je me sois jugée nulle : j'avais même l'estime pour ma personne.
Mais je ne voyais pas comment convaincre un homme
de ma valeur. S'ils ne savaient pas me repérer, me distinguer du troupeau de
jeunes filles à marier, c'est qu'ils étaient idiots. Mon
père, qui avait un dicton latin pour chaque occasion, était bien de mon avis :
<< Margaritas ante porcos 1 >>, proférait-il pour me
consoler. J'étais bien avancée!

Ma médiocrité fut scellée le jour où Marc Allégret, venu à la campagne
chez des amis communs, me repéra. A la campagne ou à
la mer, je paraissais moins butée... Il cherchait des jeunes filles pour le film
qu'il préparait et proposa à maman de me faire faire des
bouts d'essai. Elle se montre enthousiaste. Je me liquéfiai.

A la veille du rendez-vous au studio, je lui annonçaïi que je me sentais
incapable d'affronter une caméra.

<< J'aime encore mieux faire des ménages >>, lui dis-je d'un air lugubre.
On me considéra comme une débile. Mon éducation
était décidément un échec.

Après la mort de ma mère, trente ans plus tard, j'ai recueilli le grand cahier
de maroquin rouge où elle notaïit ses réflexions, ses
poèmes, et recopiait ses plus belles lettres, à Marie Laurencin, à Jean
Cocteau, à Pierre Benoit, à Paul Poiret son frère, à tant
d'autres. Au détour d'une page, dix lignes pour dire sa déception devant sa
fille aînée, qui n'avait alors qui seize ans : << Rosie a une

nature plus réceptive que créatrice. Je sais maintenant qu'elle n'a pas de
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arnaudbey