Rosie Groult
écoles catholiques, où l'on se gardait bien de nous laisser pousser des ailes.
insignifiance. Pas de déesse de la fécondité et des moissons comme
Déméter chez mes chers Grecs aux dieux multiples. Pas de trace de déesse-
mère comme chez les Egyptiens, ni même de Kali hindoue, incarnation de la
mort mais aussi de la vie. Nos dieux à nous n'étaient que des barbus.
Au pied de notre trinité masculine, on apercevait bien une forme
prosternée, la Vierge Marie. Mais elle constituait
immaculée et sa virginité, un double défi à la nature et donc un modèle
impraticable pour lés femmes. Le triste destin de cette Mater Dolorosa,
écrasée d’humilité face à Dieu son beau-père et à son Divin Fils, était peu fait
pour nous encourager sur les chemins de l'émancipation.
Nous avions bien quelques saintes, martyres le plus souvent, célébrées
pour avoir perdu leur seins ou leur tête, mais qui jamais n'avaient écrit le
moindre évangile, ni des épiîtres, ni même des prophéties comme la pythie de
Delphes, ni le moindre texte fondateur.
Je crois que si j'ai perdu la foi vers ma vingtième année, c'est à cause de
cette absence tonitruante de femmes dans l'Eglise, à la fois dans le message
évangélique, dans la hiérarchie et dans la liturgie. La formule rituelle
entendue chaque dimanche en chaire, « Mes bien chers frères », m'écartait
d'emblée du discours. Sans avoir su l’analyser en termes féministes, je me
sentais déshonorée par cette exclusion. Un prêtre venait nous dire la messe
chaque matin à l'
n